Étude sur l’impact des soins médicaux chez les adolescents transgenres
2023-2024
Le projet PARLONSMAAT: Une étude de cohorte PARrticipative LONgitudinale sur l’impact des Soins Médicaux Affirmatifs chez les Adolescents Transgenres
On estime qu’environ 0,5 % des adolescents québécois (2 500 adolescents de 12-17 ans) s’identifient comme transgenres et non binaires, c’est-à-dire que leur identité de genre ressentie ne concorde pas avec leur sexe biologique. Parmi ceux-ci, plusieurs entameront un processus d’affirmation de genre (transition) durant l’adolescence. Bien que les soins médicaux d’affirmation de genre, tels que les bloqueurs de puberté, les hormones et les chirurgies ont commencé à être offerts aux adolescents transgenres dans des cliniques spécialisées de diversité de genre depuis le début des années 2000, bien peu d’études ont décrit les impacts de ces soins sur la santé physique, la santé mentale, le bien-être et la qualité de vie de ces adolescents. Les recherches existantes ont généralement étudié de petits groupes d’adolescents sur de courtes périodes, limitant la possibilité de bien comprendre les effets réels des traitements reçus. De plus, les recommandations de traitement évoluent rapidement et les études existantes ne reflètent pas les pratiques médicales actuelles.
Il est bien connu que les jeunes transgenres présentent des problèmes de santé mentale, tel que la dépression, l’anxiété, les troubles alimentaires et les idées suicidaires à des taux qui sont de 2 à 3 fois plus élevés que pour la population générale. Les jeunes transgenres reçoivent aussi un diagnostic de trouble du spectre de l’autisme de 4 à 5 fois plus fréquemment que jeunes de la population générale. À court terme, les traitements d’affirmation de genre ont la possibilité de réduire les problèmes de santé mentale rencontrés des adolescents transgenres à des niveaux similaires à ceux des adolescents cisgenres (pour qui l’identité de genre concorde avec le sexe biologique). Cependant, les effets à long terme des traitements d’affirmation de genre sur la santé et le bien-être demeurent inconnus, étant donné la nouveauté de cette approche chez les adolescents. Il y a donc un besoin criant d’études de cohorte longitudinales, c’est-à-dire, qui suivent de grands groupes d’adolescents sur une longue période afin de mieux comprendre comment ils évoluent à la suite de leur traitement.
La clinique de diversité de genre du CHU Sainte-Justine est la première clinique interdisciplinaire au Québec à offrir des soins médicaux et un accompagnement psychosocial gratuit aux enfants et adolescents transgenres et non binaires de 8 à 18 ans. Fondée en 2016, la clinique a déjà offert des soins et services à plus de 500 enfants et adolescents et reçoit actuellement plus de 250 nouvelles demandes de consultation par année. La clinique combine l’expertise de cliniciens en médecine de l’adolescence, en endocrinologie pédiatrique, en pédiatrie générale, en pédopsychiatrie, en gynécologie, en travail social, en soins infirmiers et en psychologie, et collabore étroitement avec des professionnels du réseau de la santé, dont des partenaires dans plusieurs centres hospitaliers québécois. La clinique participe également à de nombreux projets de recherche avec des chercheurs de l’Université de Montréal et d’autres centres d’expertise du reste du Canada et d’ailleurs dans le monde. Par son volume de patients, sa structure interdisciplinaire, et son large réseau de partenaires cliniciens et chercheurs, la clinique de diversité de genre du CHU Sainte-Justine offre un environnement idéal pour une étude de cohorte auprès d’adolescents transgenres.
Le projet PARLONSMAAT vise à répondre à un besoin pressant d’étudier les effets concrets des traitements d’affirmation de genre sur la santé et le bien-être des adolescents transgenres. En utilisant une approche de recherche novatrice, la recherche participative, l’équipe de recherche collaborera étroitement et tout au long du projet avec des adolescents transgenres et leur famille afin d’élaborer les questions de recherche, de réaliser le projet et d’analyser les résultats. Cette approche permettra de mieux interpréter les conclusions et de les appliquer à l’expérience vécue par les jeunes transgenres et leurs familles.
Les objectifs spécifiques du projet seront d’étudier 4 différents éléments relatifs aux soins d’affirmation de genre en pédiatrie, soit :
- Les effets des bloqueurs de puberté et des hormones affirmatives (ex. testostérone et estrogène) sur la santé physique et de la santé mentale des adolescents transgenres;
- L’impact du soutien et de l’accompagnement de la famille et de l’entourage sur la santé mentale et le bien-être des adolescents transgenres;
- Les différences au niveau des besoins et des trajectoires de soins entre les adolescents transgenres de sexe masculin et féminin;
- Les impacts de différents facteurs démographiques (p. ex. langue parlée, ethnicité, niveau socio-économique) et développementaux (p. ex. trouble du spectre de l’autisme) sur les trajectoires de soin des adolescents transgenres.
Les participants recrutés pour cette étude seront invités à remplir des questionnaires électroniques à des intervalles réguliers tout au long de leur période de suivi à la clinique ainsi qu’après avoir effectué une transition vers les services adultes. Les questionnaires permettront de décrire les caractéristiques des participants à leur première consultation à la clinique et de suivre l’évolution de leur santé physique, de leur santé mentale (p. ex. symptômes anxieux, dépressifs, idées suicidaires) et de leur fonctionnement familial et scolaire durant et après leur suivi à la clinique. Les tests de laboratoires (p. ex. tests hormonaux), de même que les prescriptions médicales, chirurgies et autres traitements reçus (p. ex. suivi en psychologie/travail social) seront aussi analysés par l’équipe de recherche.
ORIGINALITÉ DU PROJET
Ce projet mènera à la création de la plus grande cohorte de recherche d’adolescents transgenres en Amérique du Nord et la seule cohorte de ce type au Québec. Le design de recherche unique utilisant une approche participative en collaboration étroite avec des adolescents transgenres et leur famille permettra une qualité de données non retrouvée dans d’autres études existantes et poussera plus loin l’interprétation des résultats afin d’améliorer les soins offerts à cette population.
IMPACT POTENTIEL SUR LA SANTÉ DES ENFANTS
Étant donné le grand nombre d’enfants et d’adolescents transgenres au Canada (10 000 adolescents de 12 à 17 ans, selon les derniers sondages et recensements), le projet PARLONSMAAT permettra d’identifier les impacts concrets des soins d’affirmation de genre et de déterminer la meilleure façon d’accompagner les adolescents transgenres afin de favoriser leur santé, leur bien-être et leur épanouissement. Nous anticipons un recrutement de 200 à 400 participants lors de la phase initiale du projet (3 ans), un nombre qui pourrait augmenter et atteindre plus de 1 000 participants si le projet se poursuit pour 5 années de plus. Ainsi, notre étude permettra de créer une immense base de données qui permettra de suivre l’évolution des soins reçus et le devenir à long terme des participants, et de valider les meilleures pratiques médicales pour le soutien des adolescents transgenres. Ces données permettront de guider la mise sur pied et l’amélioration des cliniques de diversité de genre à travers le Canada, considérant que l’offre de service actuelle demeure limitée et ne parvient pas à répondre à la demande grandissante pour ce type de soins.
IMPACT POTENTIEL SUR LA FORMATION D’ÉTUDIANTS
Au moins 4 étudiants seront formés directement par ce projet. Un étudiant de niveau maîtrise participera au projet pendant 2 ans et sera supervisé(e) par le chercheur principal. Trois stagiaires pré- ou post-diplômés effectueront également des stages d’été sous la direction de l’équipe de recherche. Comme une quantité impressionnante de données qui sera récoltée, plusieurs étudiants de niveau pré et postdoctoral pourront également se joindre à l’équipe de recherche.
EFFET DE LEVIER POTENTIEL
Le financement reçu permettra à la cohorte PARLONSMAAT de s’imposer comme un pilier de la recherche sur la santé des adolescents transgenres en Amérique du Nord. Initialement menée dans un seul centre (le CHU Sainte-Justine), l’étude pourra être étendue à d’autres sites partenaires (p. ex. CHU de Québec, CHU de Sherbrooke) qui travaillent actuellement à la mise sur pied de leur propre clinique de diversité de genre. Le financement permettra également au projet d’obtenir la crédibilité nécessaire pour l’obtention de subventions de recherche d’envergure qui permettront d’en assurer la pérennité.
Informations
Chercheur.se principal.e
- Dr Nicholas Chadi, pédiatre et chercheur spécialisé en médecine de l’adolescence diplômé des universités McGill, de Montréal, de Toronto et Harvard.
Collaborateur.trices
- Annie Pullen-Sansfaçon PhD – Université de Montréal
- Diane Rottembourg MD – CHU de Sherbrooke
- Kevin Lavoie PhD – Université Laval
- Laurence Arsenault-Blanchard MD – CHU de Québec
- Lyne Chiniara MD MA – CHU Sainte-Justine
Centre de recherche
- Centre de recherche du CHU Sainte-Justine
Année
2023-2024
Axe(s) de recherche
- Neurodéveloppement et santé mentale